Une adolescente de 15 ans, victime d’abus sexuels commis par son ancien père d’accueil Richard Lemaire, témoigne avec courage devant la cour criminelle d'Albi.
Mardi 21 janvier, au deuxième jour du procès de Richard Lemaire, jugé pour une série de viols devant la cour criminelle d'Albi, une adolescente de 15 ans, l'une des deux victimes, a livré un témoignage poignant sur les violences subies pendant 4 ans, entre ses 9 et 12 ans, dans la maison d'accueil de Sémalens. Cheveux longs bruns encadrant un visage grave, vêtue d'un jean patte d'éléphant et d'un tee-shirt bleu à manches longues, la jeune fille s'avance vers la barre.
Avant même de commencer son récit, ses premiers mots donnent le ton : 'Merci. Grâce à lui, je suis devenue plus forte. Je sais ce que je vaux et je veux dire à certaines personnes que ce n’est pas de leur faute.' Une déclaration qui résonne dans la salle d’audience, soulignant la résilience d'une enfant brisée, devenue aujourd'hui une jeune femme déterminée. Placée en urgence dans la famille d’accueil de Richard Lemaire à l'âge de 6 ans, la victime raconte avoir d'abord découvert un environnement 'rassurant', bien loin de la violence paternelle et des difficultés d'une mère dépassée. Dans cette maison de Sémalens, elle trouve un cocon où elle peut redevenir une enfant. Pour la première fois, elle se sent protégée, tout en conservant un rôle protecteur envers son petit frère, alors âgé de 3 ans, placé avec elle. La vie semble suivre un cours paisible. Mais tout bascule à ses 9 ans, lorsque l’attitude de Richard Lemaire change. 'Il m’a parlé de faire l’amour avec ses doigts' Avec une voix tremblante mais ferme, la jeune fille raconte les premières fois où l’accusé se rapproche d’elle : 'Ça a commencé un soir dans ma chambre. Il m’a caressé le sexe et la poitrine, sur et sous le pyjama. Il m’a parlé de faire l’amour avec ses doigts'. La scène se reproduit à plusieurs reprises, des mois durant. Les rapports ont également lieu sur un lit de camp dans 'la pièce de chasse', pièce située au sous-sol de la maison, une pièce sombre où le père d’accueil stockait ses fusils de chasse et de pêche mais aussi… des bonbons (qu’il donnait pour 'récompenser' la victime après les rapports), des préservatifs et des sex-toys. Il lui montrait également des films pornographiques pour qu’elle fasse la même chose. 'Mais il ne fallait pas faire de bruit pour ne pas réveiller Madame. Et puis, c’est allé plus loin', précise la jeune femme. Son regard s’abaisse un instant, mais elle poursuit, comme pour alléger le poids des souvenirs. Fellations, pénétrations anales et vaginales, digitales et péniennes mais aussi l’utilisation d’objets sexuels… les rapports s’intensifient, 'jusqu’à l’épuisement' pour certains actes. 'Il me faisait croire que c’était normal. Il m’offrait même des bijoux et du parfum. Je ne pouvais pas lui dire non sinon j’étais punie (moins d’écrans, coupure internet, etc.). Des punitions discrètes pour ne pas que sa femme comprenne. De toute façon, il me disait que si je parlais, il irait en prison toute sa vie.' Un récit glaçant. 'Aujourd’hui, je culpabilise moins. J’ai compris que ce n’était pas de ma faute' Richard Lemaire, lui, reste impassible. La victime continue, expliquant comment l’homme, ancien militaire devenu père d’accueil, profitait des moments où elle se retrouvait seule avec lui pour commettre ses actes. 'Je me suis laissé faire par peur mais j’ai tenté à plusieurs reprises de résister en le menaçant de ruiner sa vie comme il l’a fait avec la mienne'. Outre les agressions physiques, la jeune fille évoque du dégoût et le sentiment de culpabilité qu’elle a longtemps ressenti. Courant 2021, la victime essaye d’en parler autour d’elle. Mais personne ne la croit et le calvaire continue. Au total, l’adolescente estime avoir été violée 'au minimum, une centaine de fois. Une à quatre fois par semaines'. 'Aujourd’hui, je culpabilise moins, j’ai compris que ce n’était pas de ma faute. Mais ça reste compliqué. La seule chose que j’attendais, ce sont des excuses. Il l’a fait, c’est tout ce dont j’avais besoin', conclut-elle. À la sortie de l’audience, de nombreux magistrats ont salué son 'courage exceptionnel'.
Viol Témoignage Justice Abus Sexuels Procès Famille D’Accueil
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