[ARCHIVES] En juin 1998, libe publiait un portrait l'écrivaine américaine Toni Morrison. Nous republions cet article à l'occasion de sa disparition.
En juin 1998, «Libération» publiait un portrait l'écrivaine américaine Toni Morrison, prix Nobel de littérature, rencontrée à l'occasion de la publication de son roman «Paradis». Nous republions cet article à l'occasion de sa disparition.
Traversant majestueusement le hall du palace parisien, la silhouette est en effet imposante. Vêtue de tuniques colorées, les cheveux fièrement tressés, elle refuse de se laisser prendre en photo à l'improviste, scrutant son interlocuteur d'un regard froid. A 67 ans, Toni Morrison a bien l'allure de la papesse du féminisme, de l'idole de la communauté black, de l'écrivain planétaire. Jusqu'à ce qu'elle parle.
Sa famille suit la migration des Noirs quittant le Sud ségrégationniste pour un Nord en principe plus ouvert. Ses parents s'installent à Lorain, petite ville industrielle de l'Ohio. Toni Morrison naît en pleine Dépression.
Toni Morrison ne se laisse pas tourner la tête. James Baldwin, autre écrivain noir et célèbre, l'avait avertie, à la parution de son premier livre: «Toni, le talent ne suffit pas. Il faut tenir la distance. Il faut être fort.» Ce qu'elle est: «J'ai écrit des livres que personne n'achetait, je suis toujours attaquée, on me dit sans cesse que je devrais écrire des livres différents ou bien écrire autrement.