Leïla Slimani : Entre identité et exil

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Leïla Slimani : Entre identité et exil
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Rencontre avec l'auteure Leïla Slimani autour de son nouveau roman, J’emporterai le feu, troisième tome de la trilogie du Pays des autres, qui explore les thèmes de l'identité, de l'exil et de la sororité.

Inaugurée en 2020 avec Le pays des autres, la fresque romanesque de Leïla Slimani mêle l'histoire de sa famille et du Maroc, depuis la rencontre de Mathilde et Amine jusqu'à l'émancipation de leurs enfants dans Regardez-nous danser. Remontant jusqu'aux années 1990, Leïla Slimani éclaire ici le présent via le personnage de Mia, mais également sa sœur, sa mère ou encore la figure tutélaire qu'est son père, accusé à tort de détournements de fonds.

Porté par la plume toujours aussi captivante de Leïla Slimani, J’emporterai le feu raconte les choix existentiels, l'identité – féminine, masculine, queer – et l'exil d'un pays auquel on ne sait plus si on appartient. Rencontre. Que partagez-vous le plus avec votre protagoniste, Mia, a priori loin de vous ? Le fait d'être écrivaine, d'abord. Et tout ce qui a trait aux déchirements autour de notre identité et cette difficulté, quand elle arrive en Europe, du regard porté sur elle : elle n'a pas envie de jouer le personnage exotique et elle a l'impression qu'elle incarne une forme de cosmopolitisme que l'on ne comprend pas, que l'on n'entend pas. Quant au personnage d'Inès, ne ferait-il pas écho à celui d'Adèle, dont la quête sexuelle est racontée dans Dans le jardin de l'ogre, votre premier roman publié il y a dix ans ? En effet, Inès jouit du désir qu'on lui porte parce que, pour elle, devenir une femme, c'est être objectivée. Elle accepte aussi une forme de violence de la part de ses amants, de la société, et même de Mia, qui décide d'être du côté des hommes, de ceux qui dominent. Chacune des deux sœurs, à leur manière, trouve sa place par rapport à ce système dont elles comprennent très bien les ressorts. Si Inès et Mia font le choix de ne pas appartenir au même monde, elles s'aiment intensément, partagent un roman familial et des épreuves comme l'immigration ou ce qui est arrivé à leur père… C'est une relation centrale dans le livre et qui était très importante pour moi parce que je n'avais pas encore traité cette question de la sororité, alors que mes sœurs sont des appendices de mon corps, comme je le suis pour elles. « Il n'y a que dans les livres que l'innocence existe » écrivez-vous, en rapport avec votre père, accusé à tort de détournement de fonds, emprisonné et innocenté seulement après sa mort… Ce livre m'a dévorée. Il a fallu entrer dans la tête de mes parents, revivre des choses dont j'avais été actrice moi-même, contrairement aux deux premiers tomes où ce sont des histoires que l'on m'avait rapportées. J'ai vu mes personnages devenir adultes, vieillir, et j'ai constaté qu'au fil des années, les idéaux s'émoussent, on fait des compromis. Il n'y a que dans les livres qu'on peut prendre du temps pour les autres, essayer de dissiper les malentendus, retrouver quelque chose de pur qui subsiste en soi, mais qui, dans la vie quotidienne, a très peu de place pour s'exprimer. Car le monde – et nous-mêmes – ne cessons de nous juger. Justement, ce monde que vous décrivez dans J’emporterai le feu n’est plus… Tout en résonnant singulièrement avec notre époque. Lorsque Salman Rushdie était menacé d’une fatwa ou qu’on parlait d’une affaire de voile à Creil, on pensait qu’il n’en serait plus question dans vingt ans ! Alors que le mur de Berlin venait de tomber, on s’imaginait que la démocratie allait se répandre en une sorte de mondialisation heureuse qui aurait de moins en moins de frontières. On ne réalisait pas les dangers d’un libéralisme qui court à sa perte, on ne voyait pas les débuts de la crise migratoire. En quoi cette trilogie du Pays des autres a-t-elle affiné votre regard sur votre pays natal, le Maroc ? J’ai réalisé que tout ce que j’ai hérité de mes grands-parents, mes parents, mes amis, fait de moi une femme foncièrement libre. Et que le plus difficile, ce n’est pas d’être étranger quelque part, mais parmi les siens. Cela peut venir de l’éducation, de la langue, du fait d’être une femme, de la disgrâce – d’une forme de déchéance sociale où l’on vous fait comprendre que vous n’avez plus votre place. Ce sentiment assez métaphysique, on ne s’en défait peut-être jamais mais il décuple l’empathie. Je sais exactement où se place ma loyauté, qui n’est ni définie par le sang ni par le groupe. Cette forme de solitude est un abri sacré. L’écrivain Kamel Daoud, dont vous êtes proche, a dit de vous que vous étiez « la Française du futur » ! Il sait que je suis complètement dingue de Riad Sattouf et de L’Arabe du futur ! Quand j’entends des chansons racistes durant les législatives, que je vois que l’on refuse des postes aux binationaux, cela m’humilie et me met en colère car on se trompe sur les Français du futur. Ils ont des origines diverses, parlent plusieurs langues, ont côtoyé d’autres religions. C’est peut-être déjà la France du présent. Il faudrait juste la regarder en face et l’accepter

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