Une enquête de l'Humanité révèle de nombreux dysfonctionnements et dérives marketing au sein du 52e Festival international de la Bande dessinée d'Angoulême. Le journal pointe du doigt le délégué général Franck Bondoux et met en lumière une culture de la surcharge, des burn-out, et des accusations de comportements inacceptables envers les salariées.
L'ambiance s'annonce électrique lors du 52e Festival international de la Bande dessinée qui ouvrira ses portes à Angoulême le 30 janvier. « L'Humanité » vient en effet de publier une grande enquête qui met en lumière les nombreux dysfonctionnements au sein de 9e Art +, la société gérant l'événement, et pointe du doigt son délégué général, Franck Bondoux . Le journal dénonce une dérive marketing de l'événement, qui peine à concilier ambitions artistiques et rentabilité.
Des faits que beaucoup murmuraient depuis un certain temps, sans que personne n'ouvre la boîte de Pandore aussi frontalement. Les signaux étaient de plus en plus pressants, notamment en amont de cette nouvelle édition. D'abord, un partenariat avec Quick, avec des burgers en forme d'étoile de shérif en hommage à Lucky Luke (qu'en dirait Morris ?), qui selon Franck Bondoux devrait permettre de « toucher un plus grand nombre de jeunes ». Mais qui a laissé les journalistes circonspects lors de la présentation à la presse du mois de novembre. Ensuite, une hausse de 25 % des prix d'entrée de la billetterie : un pass quatre jours coûte désormais 60 euros, soit 15 euros de plus qu'en 2024. « La règle pour les expositions, c'est la coproduction » avec les éditeurs, y apprend-on, dans le souci de réduire le déficit de la manifestation, qui s'élèverait à 250 000 euros selon le magazine. Ce qui, évidemment, ne garantit pas une totale objectivité des choix et bénéficie aux maisons d’édition les mieux loties. Ces nouvelles contraintes expliquent sans doute l’appauvrissement de l’offre éditoriale. De douze expositions en 2020, nous sommes passés à huit pour l’édition 2025. Mais aussi l’instabilité de la direction artistique, depuis le départ en 2020 de l'estimé Stéphane Beaujean vers les éditions Dupuis. Ces cinq dernières années, pas moins de sept directeurs artistiques différents sont passés par là, exerçant « sans contrat de travail » et avec un certain flou autour de leurs missions. Johanna Bondoux, fille du délégué général Franck Bondoux, a été promue « directrice du développement », avec des prérogatives très étendues, de la direction de la communication à la nomination des membres du jury. Des prestations qu’elle assure via sa société Mentalo, structure qui s’ajoute à Partnership Consulting, dirigée par Franck Bondoux, au sein de la SARL 9e Art + (également créée par lui en 2007). En 2021, la chambre régionale des comptes dénonçait, dans un rapport, un montage financier « complexe et peu lisible ». Multiplication des burn-out Sur toute la chaîne de l’organisation, les cas d’épuisement et de burn-out se multiplient. « Le problème du management, c’est qu’il n’y en a pas. Chacun est très autonome et les mois qui précèdent le festival, c’est la surcharge », explique un ancien salarié. « Tout se fait dans la crise perpétuelle », renchérit une ancienne cadre. Bien que il ait vu pleurer cette dernière, Franck Bondoux « ne voulait pas entendre parler de souffrance au travail ». « L'Humanité » revient aussi sur la réaction du délégué général à la suite d’une affaire de viol qui se serait déroulée lors de l’édition 2024. Une responsable de la communication raconte s’être réveillée nue dans une chambre d’hôtel aux côtés d’un collègue après un black-out. Mis au courant quelques jours plus tard, Franck Bondoux aurait décliné toute responsabilité de la part du Festival, les faits s’étant déroulés en dehors des heures de travail. Après un arrêt de travail et une plainte déposée au commissariat, la salariée de retour à son poste se voit reprochée par Bondoux des « comportements inadmissibles ». Quelques jours plus tard, l’employée est licenciée pour faute grave, car elle serait apparue « fortement alcoolisée » lors de la manifestation. Un comble pour qui connaît l’ambiance du Festival. Elle a saisi les prud’hommes. « La parole n’est pas libre » Rappelons que le Festival n’a pas toujours été exemplaire quant à la place des femmes. Une polémique sur le Grand Prix avait secoué l’édition 2016, car aucun nom d’autrice ne figurait parmi la présélection (le système de vote a changé depuis). Le collectif des créatrices de bande dessinée contre le sexisme avait alors appelé au boycott, tandis que Franck Bondoux prétendait que « l’histoire de la BD jusqu’aux années 1980 est essentiellement d’obédience masculine ». En 2022, au plus vif de « l’affaire Bastien Vivès », ce même Franck Bondoux utilisait des arguments tous azimuts pour défendre les mérites du dessinateur, comme : « Je note que Bastien Vivès a été adapté au cinéma et en série par des femmes, qui doivent trouver un intérêt à sa représentation. » Interrogé par « l'Humanité » sur une éventuelle toxicité au travail, le délégué général de 9e Art + répond : « Les difficultés qui ont pu survenir dans ce registre, sur vingt ans, se sont avérées très marginales ».
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