La Pampa, le nouveau film d'Antoine Chevrollier, explore avec sensibilité et réalisme les épreuves et les joies de l'adolescence dans un village rural français. Inspiré par les souvenirs de l'enfance de Chevrollier, le film nous plonge dans une histoire d'amitié, de famille et de découverte de soi, marquée par un événement tragique qui bouleverse la vie des personnages. Le casting, mené par Sayyid El Alami et Artus, est particulièrement remarqué, ajoutant une dimension émotionnelle puissante au récit. Entretien avec Antoine Chevrollier sur la genèse du film, son approche unique du genre coming-of-age et la thématique du territoire.
Comment exister au monde ? Affronter les premiers bonheurs et écueils de la vie ? Ce sont les éternelles questions du « coming of age », l'ultra-formaté récit de transition dont Antoine Chevrollier (Le Bureau des légendes, Baron Noir, Oussekine) et ses co-scénaristes Faïza Guène et Bérénice Bocquillon, s'emparent avec sincérité et délicatesse dans La Pampa .
Au commencement, l'amitié entre Willy (Sayyid El Alami) et Jojo (Amaury Foucher), deux adeptes de motocross, tuant le temps sur les routes (et les terrains) de leur village de Maine-et-Loire. Jusqu'à ce qu'un événement - qu'on ne spoilera pas pour préserver le plaisir de visionnage - bouleverse cette relation et toutes les dynamiques familiales. Du cinéma à hauteur d'adolescents, d'une grande puissance émotionnelle, dont la réussite tient aussi à un casting inspiré. Mention spéciale à Artus, terrifiant dans un rôle à contre-emploi et au magnétique Sayyid El Alami, dont le seul regard traduit déjà mille nuances de sentiments. À l'occasion de la sortie du film, Antoine Chevrollier revient sur la conception de La Pampa, sélectionné en mai dernier à la Semaine de la critique à Cannes et déjà récompensé de plusieurs prix en festival (Cinemania, Premiers plans d'Angers, Festival International du Film Politique de Carcassonne, etc). Vanity Fair. La Pampa est né des souvenirs de votre enfance. Était-il évident, dès le début, qu’il s’agirait d’un film très sensoriel ? Antoine Chevrollier. Oui, le film a vraiment émergé des sensations liées à mon enfance et mon adolescence à Longué-Jumelles, en Pays de Loire, avant qu'on ne structure le récit avec mes co-scénaristes Faïza Guène et Bérénice Bocquillon. Quand je suis revenu dans la région pour voir ma famille, j’ai ressenti, dans un premier temps, des sensations familières : la chaleur, le danger, le côté trompe-la-mort. Mais aussi le rapport à l’ennui, au sentiment d’insularité ou d’exclusion au monde. Les moyens de transports, c’est galère. Avoir des activités est impossible. Tout passe par le sport, les bêtises avec les copains, ou les heures passées à discuter avec eux. En parlant avec mes nièces et neveux, en me baladant dans le village, j’ai réalisé que nous avions vécu les mêmes expériences, à un détail près : le téléphone et les nouvelles technologies. On le montre d’ailleurs dans le long-métrage, car c’est un vecteur de harcèlement. Cela a toujours existé, seuls les outils ont changé… Comment avez-vous appréhendé la question du territoire et choisi les lieux de tournage ? Ce n’est pas un film sur le motocross, mais sur les frères, les sœurs, les pères, les mères. En écrivant le scénario, les décors de mon territoire et de mon village sont remontés instinctivement. Je m’y suis projeté mentalement, puis physiquement, lors de mes visites à Longué-Jumelles. Par exemple, ma nièce m’a amené à l'hôpital désaffecté, où nous avons tourné plusieurs scènes. Il était encore en activité, quand je vivais là-bas, mais il est devenu le refuge des adolescents et des jeunes adultes du coin. Le lieu où ils se baladent, où ils aiment se faire peur. Il y a aussi notre Mississippi à nous : la Loire, un fleuve magnifique, mais très peu montré. Ici et là, on a repéré une église, un chemin, un terrain vague, etc. La Pampa est le nom du terrain de motocross, mais c’est aussi un titre qui ouvre l’imaginaire, évoque l’image de grands espaces… Tout à fait. Il y a ce double sens. Quand on dit : 'Il habite au milieu de la pampa”, c’est l’idée qu’il habite au milieu de nulle part. Moi, j’ai toujours été convaincu que nos trajectoires, nos vies, nos drames, nos joies étaient absolument épiques. Et ce, malgré l'ennui, malgré une représentation souvent fallacieuse et tronquée de notre classe et de nos territoires. C'est bien plus virevoltant que ce qu'on peut imaginer. D'ailleurs, la littérature, comme le cinéma, se sont emparés de ces récits. Il y avait cette envie, dès le départ, de montrer à quel point, dans l'aspect trompe-la-mort comme dans les joies, les curseurs étaient très hauts. Je voulais que cela transpire dans le film. En nous entraînant sur des chemins inattendus, le film nous pousse à revoir nos propres systèmes de pensée… On s’est interrogés, en ces termes-là, sur les gestes scénaristique et dramaturgique. Voilà un format, le coming of age (film sur le passage à l’âge adulte, NDLR) qui est vu et revu, du Rouge et le noir de Stendhal à Stand by me de Rob Reiner. Comment faire en sorte que le spectateur soit dans une forme de confort et de structure, mais qu’il soit aussi bousculé ? Avec Faïza et Bérénice, nous voulions faire un pas de côté et éviter l'aspect un peu dogmatique de ce sous-genre. L’idée était d’épouser une forme d'instabilité positive pour que le film soit haletant au possible. D'autant que toutes les émotions sont exacerbées quand on a 16, 18 ou 20 ans. Dans l’émission Beau Geste, présentée par Pierre Lescure, Artus déclarait que certains financiers avaient été réfractaires à sa présence dans le fil
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