Un mois après la chute du régime de Bachar al-Assad, la population syrienne respire. Le marché de Souk El Al à Damas témoigne d'un regain d'espoir grâce aux nouvelles décisions prises par les nouveaux dirigeants.
Un peu plus d'un mois après la chute de Bachar el-Assad, la communauté internationale reste vigilante face au nouveau pouvoir. Mais les islamistes du HTS qui dirigent désormais le pays ont aussi pris de premières décisions qui mettent du baume au cœur de la population. Au Souk el Hal, un marché très populaire du centre de Damas , partout de grands sourires sur les visages.
Les étals regorgent de bananes, noix de coco, kiwi, ananas… Des produits rares du temps du régime ont refait leur apparition à des prix abordables. Beaucoup se pressent autour du micro pour nous dire leur satisfaction. « Même les bananes ! On en rapportait à la maison mais c’était juste pour les bébés ou les petits enfants. Nous les adultes on n’en mangeait pas. La pression que nous ressentions en permanence s’est évanouie. Même le ciel est redevenu le ciel. » Les commerçants sont pour l'heure exemptés de taxes. Zeynab tient un petit stand, elle est soulagée de ne plus être rackettée par le régime qui avait pris l’habitude de se servir dans les poches des Syriens, développant un vaste système de prédation dans le pays à tous les niveaux. « Le loyer pour les stands, tout ça, merci Dieu nous en sommes débarrassés. Nous sommes libres de parler. Le dollar a baissé. Tout ça, c’est mieux. Et avant les policiers qui venaient et se servaient gratuitement sur nos étals. » Au souk El Al de Damas, Zeynab satisfaite de la fin du racket, sans doute la plus populaire, c’est également la fin du service militaire obligatoire, applaudie par l’ensemble des Syriens quelle que soit leur confession ou leurs opinions. Comme Mazen, rappelé sous les drapeaux au moment de la révolution, mais qui ne pouvait imaginer, dit-il, tirer sur ses frères syriens et rejoindre une armée qui servait non le peuple ou le pays, mais un seul homme. Mazen a vécu comme un clandestin durant sept ans. « J’étais libre, mais c’est comme si j’étais en prison. Sept ans de souffrance, à ruser pour passer les checkpoints. Si vous étiez pris, vous étiez fini. » Pour circuler, car il fallait bien faire vivre la famille, il utilisait la carte d’identité de son frère auquel il ressemble. Un jeu dangereux pour tous les deux. « c’est lorsque vous deviez passer les barrages. Ils prennent la carte d’identité, la regardent longuement en se demandant si je ressemble à la photo. Et puis ils appellent : ‘Maher !?’ C’est le nom de mon frère, parfois, j’oubliais et soudain je réalisais que c’était moi, Maher… » Il lui arrivait de jouer l’attardé mental pour ne pas éveiller les soupçons, de marcher de longues heures en passant par des quartiers désertés afin d’éviter les checkpoints de l’armée qui surgissaient à tout bout de champ. « Vous êtes chez vous terrifié, on peut frapper à la porte à tout moment. Quand j’entendais des pas dans l’escalier, je sautais sur le toit pour m’échapper par un autre immeuble… Ce qui me rend le plus triste, c’est que durant toutes ces années, je n’ai pas pu profiter de mes enfants. J’étais toujours stressé et cette peur me tuait. »Aujourd’hui, Mazen a toujours du mal à se rendre dans un lieu public. Les jeunes comme Fadi, eux, respirent. « c’est un soulagement pour nous les jeunes. Tous les étudiants, nous souffrions à cause de ce service militaire, de l’inconnu qui pesait sur notre avenir. Vous ne saviez pas après vos études où vous iriez, au service ou à l’étranger. Et dans quel pays. Maintenant, nous pouvons envisager d’avoir un avenir dans notre pays. » Fadi espère devenir journaliste et pouvoir mener des enquêtes dans son pays, raconter la Syrie aux Syriens et au monde. Mais il est une douleur qui reste prégnante, celle des familles de disparus qui parcourent le pays en quête de nouvelles de leurs proches. La quête de vérité de centaines de milliers de familles Des centaines de milliers de familles qui placardent des photos dans tout Damas, vont dans les hôpitaux, les morgues, frappent aux portes des ONG, manifestent… Demandent des réponses. Comme Amani Al-Asbah dont le frère a été enlevé au tout début de la révolution. « le pays est détruit. Nous ne demandons pas que la recherche des disparus soit une priorité parce qu’il y a tellement d’autres choses, mais ce que nous demandons, c’est de ne pas clore ce dossier des disparus, de travailler dessus jusqu’au dernier moment. Jusqu’à ce que les parents de chaque disparu sachent ce qui est arrivé. Que chacun puisse avoir quelque chose à enterrer… » Ce n’est qu’alors que la douleur de ces familles trouvera un apaisement. Et qu’elles pourront imaginer se reconstruire dans la 'Nouvelle Syrie'
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