Une course à pied bretonne, « Pig and run », qui propose des dégustations de produits porcins, a rencontré un vif succès mais fait l’objet d’un boycott demandé par les écologistes.
C’est une version bretonne du marathon du Médoc. Organisée chaque année en septembre au milieu des vignobles du Bordelais, cette course à pied fait la promotion des spécialités locales, et notamment du vin. Au ravitaillement, les athlètes plus ou moins entraînés peuvent donc goûter les crus du Médoc qu’ils traverseront comme le Pauillac, le Margaux ou le Saint-Estèphe. Un événement populaire qui a attiré plus de 8.500 coureurs l’an dernier et qui continue d’inspirer.
En Bretagne, l’idée d’organiser une course dans la même veine a germé dans l’esprit d’une poignée d’éleveurs de porcs. Sauf qu’en Bretagne, il n’y a pas de vin. Ou si peu qu’il ne suffirait pas à garnir les tables d’un ravitaillement sportif. Les membres du puissant comité régional porcin ont donc décidé d’opter pour une course à pied « qui envoie du pâté », où les coureurs pourraient goûter leurs produits à chaque ravito. « On avait envie d’un événement nouveau pour parler de notre métier, faire un truc festif et original. Comme on est plusieurs éleveurs à courir un peu, on a eu l’idée d’organiser une course à pied », raconte Adrien Simon, éleveur de porcs en Ille-et-Vilaine. La « Pig and run » (cochon et courir en français) était née. Les dossards s’arrachent en quelques heures Jusqu’ici, tout allait bien, et l’événement a rapidement rencontré un vif succès. En moins de quarante-huit heures, les 500 dossards proposés à une vingtaine d’euros avaient trouvé preneurs. « On ne s’attendait pas à que ça parte si vite », reconnaît l’organisateur de ce trail de 23 kilomètres qui se tiendra le 18 mai autour de la ria d’Etel, dans le Morbihan. Précisons que la meilleure femme et le meilleur homme remporteront « leur poids en viande de porc » et que chaque participant repartira avec « un souvenir cochon ». Le succès était donc total jusqu’à l’apparition d’une pétition lancée en novembre. D’abord confidentiel, cet appel à boycotter a profité de la médiatisation de l’affaire pour prendre en épaisseur. Ce vendredi, plus de 22.000 personnes avaient signé ce texte imaginé par une militante écologiste basée à Rennes. « Cette course fait de la publicité pour le lobby agro-industriel de l’élevage porcin, une source majeure de pollution des eaux et des sols bretons. Il faut mettre un terme à cette promotion irresponsable de pratiques environnementalement dommageables. Le lobby porcin n’a pas le droit de se faire de la publicité sur le dos des coureurs à pied », explique l’auteure de ce texte. Plusieurs associations environnementales et animalistes comme L214 ont apporté leur soutien à la pétition. Les éleveurs tentent de se défendre Illustrée avec une photo d’un sanglier mort sur une plage souillée d’algues vertes, cette pétition ne demande pas l’annulation de la course mais son boycott. Un texte auquel les organisateurs ne s’attendaient pas. « Oui, je suis surpris de l’ampleur que ça a pris. On ne pensait pas qu’un événement comme celui-là ferait polémique. On n’a forcé personne à s’inscrire », admet Adrien Simon. Habitué à communiquer sur son métier, le jeune éleveur a l’habitude de défendre sa profession face aux attaques récurrentes sur les pollutions et nuisances générées par la concentration très dense des élevages de porcs en Bretagne. Dans une note publiée en 2022, l’Observatoire de l’environnement notait « une baisse régulière depuis les années 2000 » des concentrations en nitrates mais qui « sont encore à des niveaux qui dégradent la qualité des eaux ». « On connaît notre impact » Un constat bien connu des éleveurs, qui assument. « On connaît notre impact sur l’environnement et on a beaucoup évolué dans nos pratiques, on a investi. On a des normes qui nous sont dictées et on les respecte », se défend Adrien Simon. Avant de conclure. « Cette course, c’est juste un moyen décalé de parler de notre métier, point ». Un métier qui continue de faire parler, dans une région tiraillée entre le poids de son agriculture et la fragilité de son environnement
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